dimanche 29 novembre 2020

Gilles Vidal : " Loin du réconfort "

 


Editions Zinédi

166 pages


4 ème de couverture



Avec son style efficace, soigné et souvent poétique, Gilles Vidal construit un road movie littéraire haletant au rythme soutenu, sans temps mort. Un roman hors normes, hors cases, sans étiquette.
En rentrant chez lui, Franck découvre sa compagne sauvagement assassinée. D’abord soupçonné du meurtre, il sera finalement innocenté. Que faire de sa vie désormais ? Et pourquoi s’en est-on pris à Ivana qui portait leur enfant à naître ? Il questionnera le père de sa compagne, homme mutique, originaire de Biélorussie, mais n’obtiendra aucune réponse. Il ne lui reste qu’un bout de papier avec un nom griffonné que lui a remis un certain Moreno au commissariat. C’est bien peu pour savoir, bien peu pour comprendre, bien peu pour trouver, mais il va se mettre en route et chercher. Chercher quoi exactement ?
À mesure de ses déambulations, il écoute de la musique, se souvient, une image chasse l’autre et le ramène toujours vers le passé, le sien, celui de ses parents, les livres qu’il a lus, les musiques écoutées par les êtres aimés. Sans futur, il fuit le présent qui s’efface derrière les souvenirs et quand la douleur est trop forte, il écrit, vite, compulsivement, des phrases qui n’en finissent plus comme ce récit écrit comme une énumération sans chapitres, où la pensée saute d’une idée à l’autre, dans un aller-retour incessant entre hier et aujourd’hui, mais jamais demain.

Ce roman de Gilles Vidal surprend par sa construction singulière, comme s’il y avait urgence à ne rien oublier. L’errance nostalgique de cet homme dont le désir de vengeance n’est peut-être rien d’autre qu’une quête de sens et le besoin de rejoindre le monde des vivants est un cheminement intérieur. Comme toujours chez Gilles Vidal, les lieux sont familiers et banals, les personnages ordinaires, comme s’il ne fallait aucune fioriture pour aller à l’essentiel. Un livre en noir et blanc, comme un vieux film.



Mon avis




Dans « Loin du réconfort », Gilles Vidal fait entrer le lecteur dans la tête de Franck, un homme qui a perdu l'amour de sa vie dans des conditions atroces. J'ai adoré suivre les idées qui passent par la tête du personnage principal. Ce livre raconte les errements d'un homme confronté à l'horreur. Que ferions-nous, simples mortels si nous étions à sa place ? Si nous n'étions pas un héros à la John MacClane ? 

Dans ce road movie littéraire, j'ai reconnu le style de Gilles Vidal que j'apprécie beaucoup. Il sait mettre les mots justes sur des attitudes, des émotions ou des événements douloureux. Franck, cette homme face à lui-même, se laisse aller à des réflexions tout au long de son périple en voiture, sa vie défile dans son cerveau et y emprunte des méandres apparemment aléatoires. Il pense comme chacun pourrait le faire en se remémorant un passé plus ou moins douloureux. Qui n'a pas repensait à sa vie au volant de son automobile sur fond de musique diffusée par l'autoradio ? 
« Un panneau annonce une sortie dans une vingtaine de kilomètres. En attendant, pour calmer le jeu, je mets un CD de Johannes Brahms, les deux concertos pour piano et orchestre avec Adam Laloum au piano qui amène sa petite touche de poésie mélancolique. Ce qui comme bien au tableau après tout. » 
La mélancolie, en effet, rôde autour de cet homme qui a un projet en tête. Il aime aussi le rock qui martèle d'autres kilomètres ! Ainsi, il revoit des individus qui ont jalonné sa vie. Des paragraphes courts font la part belle à une galerie de protagonistes !

En quelques mots bien cyniques, Gilles Vidal fait le portrait d'individus qu'il a croisés dans son existence, des gens que chaque lecteur à lui-même pu rencontrer dans son parcours. C'est ce que j’appellerais la « Vidal touch », en peu de phrases, le décor est planté ! 
« Alors que je rumine ces souvenirs comme un vieil édenté son morceau de biscotte, dehors il s'est mis à geler autant que dans le cour de Josef Mengele. » 
L'écriture est impeccable. L'auteur se permet même des phrases longues de plusieurs lignes. Ce procédé pourra agacer certains lecteurs mais ce genre de passages est pour moi bien traité. 

Franck est bouleversé et revient beaucoup sur sa jeunesse avec de belles pages sur l'enfance qui peuvent faire monter les larmes aux yeux du lecteur. 
« Il est une belle contrée qui s'appelle l'enfance. Il faut en rester solidaire jusqu'au bout, balayer ses erreurs, oublier ses remords, les errements de sa vie, peu importe, demeurer jusqu'au bout du bout dévoué à l'enfant innocent que nous fûmes. » 
« Loin du réconfort » est un livre court qui m'a remuée dans le choix des thèmes abordés. Un roman qui laisse la place plus à la réflexion qu'à l'action !


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Articles les plus consultés