mercredi 28 octobre 2020

Michel Moatti : " Les jardins d'hiver "


 Editions Hervé Chopin
288 pages


4 ème de couverture



Un thriller historique entre l’Argentine des années soixante-dix et le Paris d’aujourd’hui. Au fond de la mémoire, quand la réalité vacille.


Buenos Aires, 1979. Qui est vraiment Jorge Neuman ? Un écrivain populaire, figure de la résistance à la junte militaire au pouvoir ? Ou un homme totalement détruit par la disparition de sa fille, puis de sa femme ?

J’ai rencontré Jorge Neuman par hasard, en pleine Guerre sale. Je l’ai ramassé sur le bord de la route, alors qu’il venait de s’enfuir d’un camp. Il m’a raconté, m’a ouvert les yeux. Il a voulu que je dise au monde entier ce qui se passait dans son pays, mais j’ai eu peur. Je suis rentré en France et lui a disparu.

Aujourd’hui, quarante années plus tard, je recherche ses traces partout où il a pu en laisser. Je cherche ceux qui ont croisé sa route, comme le sinistre capitaine Vidal, qui a sans doute assassiné celles qu’il aimait. Je cherche, et maintenant j’ai peur de ce que je vais trouver.



Mon avis



Violence, noirceur, abysse, voilà les quelques mots qui me sautent à la gorge en lisant « Les jardins d'hiver » de Michel Moatti. Le titre est d'ailleurs très rapidement évoqué : 

« Il faisait tout le temps nuit. Des ampoules entourées de grillage brillaient, sans aucune interruption. C'était tout le temps la nuit, mais il ne faisait jamais vraiment noir. Un clair-obscur verdâtre baignait la pièce qui leur servait de prison, semblable à cette luminosité tropicale que l'on trouve dans les serres. Par dérision, leurs gardiens appelaient ça « les jardins d'hiver ». 

Derrière un drame historique comme l'Argentine l'a connu dans les années soixante-dix, les masques subsistent et tombent au fil des chapitres. Il y a les héros, ceux qui restent ou qui résistent et ceux qui partent pour dire la vérité. Il y a les traîtres et les bourreaux. Il y a ceux qui ne voient rien ou font comme si ! Mais au final, il subsiste un énorme gâchis ! L'auteur s'interroge sur ces personnages qui ont connus les horreurs d’une junte militaire et le sujet devient universel quand on l'applique à d'autres moments de notre Histoire. 

J'ai aussi été attentive au rôle du biographe devant des événements ; est-il honnête, neutre ou est-il critique ? L'auteur joue aussi sur ce sujet. 

J'ai eu quand même quelques difficultés à entrer dans le roman. À cause du thème qui ne correspond pas à mes choix de lecture habituels et à cause des personnages que j'ai eu du mal à cerner et à trouver sympathiques. Le style est certes soutenu mais les phrases sont trop longues à mon goût.

vendredi 23 octobre 2020

Amélie De Lima : " Dans ma maison sous terre "

 


Editions LBS 

272 pages



4 ème de couverture


Été 2017, le corps d’une fillette est retrouvé dans une bouche d’égout. Elle porte le collier d’une enfant disparue vingt ans auparavant, dont le corps vient d’être découvert dans le sous-sol d’une maison du Nord-Pas de Calais.
S’agit-il du même meurtrier ou n’est-ce qu’une simple coïncidence ? Véronique De Smet tentera d’élucider cette affaire dans laquelle un village entier choisira de se taire.
Et si la réputation de ses habitants importait plus que la vérité ?


Mon avis



Clémence Barbier 8 ans est retrouvée dans le sous-sol d’une maison à Billy-Berclau en 2017 ; c’est une vieille demeure achetée récemment par le couple Melville. Ils ont découvert ce corps enseveli dans une valise en cuir datant de plus de 20 ans selon l’analyse ADN. 

Comme c'est étrange, parallèlement une fille à peu près du même âge est retrouvée morte dans une bouche d’égout avec un collier appartenant à Clémence.
Quelle est donc la relation entre ces deux filles ? La commissaire Véronique De Smet et le lieutenant Vidal sont sur l’enquête. 
« Que pouvait bien faire cette gamine avec le collier de la disparue de 1997, celle dont le corps venait justement d’être retrouvé dans le sous-sol de la maison des Melville ? » 
Les non-dits, les mensonges, le thème de la pédophilie et les secrets sont les sujets abordés dans ce roman. Amélie de Lima est une auteure que je suis depuis ses débuts ; son écriture est plus introspective. L’auteure pimente son récit en écrivant une histoire d’une extrême noirceur voire dérangeante.
Amélie de Lima a su prendre des risques en décrivant des scènes insoutenables à la limite du supportable. L’auteure est si souriante, comment fait-elle pour aborder de telles choses et faire entrer le lecteur dans une ambiance aussi sordide ? Les dialogues sont justes et percutants sans fioriture. 

jeudi 22 octobre 2020

Tom Chatfield : " Bienvenue à Gomorrhe "

 


Editions Hugo Thriller

473 pages


4 ème de couverture


Gomorrhe. Un nom murmuré dans les recoins les plus sombres des forums les plus tordus. Un site que la lie du Darknet rêve de visiter. Un marché pour les âmes torturées, où tout s'achète mais où chaque transaction peut coûter son lot de vies humaines. Un astre noir autour duquel gravitent, à condition d'en avoir l'accès, fanatiques et terroristes de toute obédience, issus de l'État islamique comme de l'extrême droite suprémaciste.
Le sésame de tous ceux qui rêvent de massacre, que celui-ci s'appelle jihad ou nuit de cristal.
Azi Bello, lui, poursuit des rêves nettement moins spectaculaires, et surtout beaucoup plus inoffensifs. Tout juste espère-t-il, depuis l'abri de jardin d'East Croydon qui lui sert de bureau, contribuer à rendre le monde un peu moins infréquentable en mettant ses talents de hackeur au profit de causes qu'il estime justes. Mais c'est bien ce « branleur de première », comme il se définit lui-même, aussi brillant derrière son écran que désemparé dans la vie réelle, qu'une mystérieuse organisation internationale va contraindre à infiltrer Gomorrhe. Et à se lancer dans un périple haletant, de Londres à San Francisco en passant par Berlin et Athènes, pourchassé par des ennemis d'autant plus dangereux qu'ils sont souvent invisibles.

Consultant pour de nombreuses entreprises dans le secteur des nouvelles technologies, éditorialiste à la BBC, intervenant régulier des conférences TED, Tom Chatfield est considéré comme l'un des penseurs les plus pertinents de nos sociétés numériques et de la révolution digitale, à laquelle il a consacré plusieurs essais, traduits dans une trentaine de pays. À la fois techno-thriller, roman d'espionnage et fresque d'une étonnante acuité sur le monde contemporain, Bienvenue à Gomorrhe, sa première œuvre de fiction, a reçu un accueil élogieux au Royaume-Uni.


Mon avis


Un sujet bien lourd, noir et glaçant, ce roman de Tom Chatfield ! « Bienvenue à Gomorrhe » nous plonge dans les méandres du Darknet. Ce faisant, il fait profiter de ses connaissances sur le monde des hackeurs. Pourtant, même si l'on n'est pas un expert en la matière, on n'est pas perdu pour autant et on arrive à comprendre cet univers très particulier.

L'auteur parvient à mélanger des chapitres techniques avec des scènes d'action et des moments intimistes. Ainsi il donne de la chair à des situations informatiques très abstraites. Il démontre les mécanismes de l'endoctrinement sans un vocabulaire compliqué. J'avais l'impression de suivre une histoire vraie.
Des notes courtes et claires en bas de page permettent de se sentir proche des personnages. Justement, j'ai beaucoup aimé Azi. Il n'a rien d'un héros quand il se fait happé par une mystérieuse Anna au fond de sa minable cabane. Ce jeune hacker va alors devoir sortir de sa zone de confort pour combattre une force sombre ; il comprend vite qu'il n'est pas bienvenu à Gomorrhe. Les autres protagonistes sont également bien construits et les faux-semblants brouillent les pistes. Difficile de savoir à qui faire confiance. Comment savoir qui est derrière les écrans ?
« Ne jamais laisser de trace. Un hackeur n'est pas un prédateur qui parade avec sa proie dans la gueule. Un hackeur n'est personne : un fantôme dans la machine, mais dans celle d'un autre. »

dimanche 18 octobre 2020

Benedict Wells : " Presque génial "

 


Editions Slatkine et Cie

320 pages


4 ème de couverture


Francis, 17 ans, est né de père inconnu. Il vit avec sa mère dépressive dans un mobile-home sordide à la périphérie de Claymont, petite ville de la côte Est des États-Unis. Avant une tentative de suicide ratée, sa mère lui a laissé une lettre d’adieu dans laquelle elle lui révèle qu’il a été conçu grâce à une banque du sperme, dont les donneurs anonymes sont sélectionnés pour leur Q.I. hors du commun. Il se met alors en tête de retrouver son géniteur, et entraîne dans son road trip son meilleur ami, le geek Grover, et Anne May, une jeune patiente de la clinique dont il est amoureux.



Mon avis



Benedict Wells avec « Presque génial » nous emmène dans un road-trip. C'est un pari risqué puisque de nombreux auteurs s'y sont collés avec un grand succès comme Jack Kerouac ! Francis est un jeune homme vivant dans un parc de mobil home foisonnant aux États-Unis avec sa mère dépressive, Katherine. Elle sera internée dans un hôpital psychiatrique car elle souffre  de troubles schizo-affectifs bipolaires.
Il apprend par une lettre de sa mère qu'il est né d'un don de sperme, il va ainsi à la recherche de son vrai père, son géniteur. Il est accompagné de Anne-May Gardener, la jeune patiente de la chambre voisine de sa mère et du geek Grover, son meilleur ami. 

L'auteur arrive à accrocher le lecteur. D'abord, il sait bien dépeindre les paysages et les lieux que le trio traverse. Et pourtant Benedict Wells est allemand. La psychologie des personnages est plutôt bien réussie. J'ai pris connaissance de chacun des trois amis au rythme de ce voyage initiatique. Ces jeunes reçoivent en pleine figure les duretés de la réalité sociale d'un pays en perte de repères. 

samedi 10 octobre 2020

Jérémy Bouquin : " Moktar "

 

Editions Cairn

344 pages


4 ème de couverture



Moktar tient le trafic de came de Saragosse. Il assure la paix sur Pau. Moktar, le manouche de la schnouf, contrôle aussi les barres d'immeubles, les avenues, la plaine de jeu, les commerces... Un véritable business à ciel ouvert, avec ses guetteurs, ses chefs de clans, leurs lieutenants. Tout ce petit monde s'est allié pour le trafic de came. Les ententes sont encore fébriles et il ne faut pas grand-chose pour allumer le feu.
La ville est tenue jusqu'au jour où deux gosses se font faucher sous les balles d'une kalachnikov 7.62.



Mon avis


Avant tout j'aimerais souligner que cette couverture est juste magnifique ! Ce polar n'est pas qu'une histoire de mecs à ce qu'on pourrait penser à la lecture de la quatrième couverture.

Dans ce récit, on va suivre Moktar, un homme fort de corpulence marié avec Sylvie et qui a quatre enfants. Son passé va se dévoiler au fur et à mesure de la lecture ; il y aura l'histoire de Coco et sa rencontre avec sa première femme Lilie. Le parcours militaire de Mokar avec Joe est aussi souligné. 

" La Légion étrangère, trois ans. Un contrat court, des opérations en Afrique. Là, j'ai rencontré Joe. A Dakar, il était sergent, on s'est pris d'amitié; "

Mais ce n'est pas que du noir, un brin d'humanité se fait sentir ; Moktar dicte quelques règles de conduite et d'éducation à certains jeunes. J'imaginais très bien au fil des pages les méandres du trafic de drogues dans le quartier de Saragosse à Pau.

" - La crise, Le Bancal, les trois morts dans la cave, les Schmitt. C'est pas le bon moment, je sais, mais c'est jamais le bon moment quand il faut mourir ! "

Jérémy Bouquin s'imprègne et se met dans la peau de Moktar. Il y a de l'action de l'adrénaline à profusion ! C'est assez prenant et addictif : les dialogues collent parfaitement aux personnages. Mais j'ai un seul point négatif à dire ; la fin est trop vite arrivée car je me suis vraiment attachée aux différents aspects de cette histoire. La qualité principale justement de cet auteur est de savoir instaurer une ambiance captivante.

J'ai lu ce polar en lecture commune avec Maud Vandenbyvanghe du site " Les lectures de Maud " , j'ai hâte de savoir ce qu'elle va en dire.


jeudi 1 octobre 2020

Sally Hepworth : " La belle mère "

 


Editions  L'Archipel

360 pages


4 ème de couverture


Avocate appréciée pour son dévouement, Diana se bat pour améliorer le sort des réfugiés, mais elle se montre froide et distante, sinon blessante, envers les siens. Ce dont souffre Lucy, sa belle-fille, qui rêvait de trouver en elle une mère de substitution.

Dix années ont passé, et Diana vient de mourir. Elle se serait suicidée. Mais, à l’autopsie, nulle trace d’un cancer… Qu’est-il donc arrivé à Diana, dont le testament a été modifié peu de temps avant sa mort ?
Avec ce suspense psychologique, dans la lignée des succès de Liane Moriarty, Phoebe Morgan ou B.A. Paris, Sally Hepworth livre le portrait glaçant d’une famille en apparence harmonieuse. En apparence seulement…


Mon avis



Le sujet abordé par Sally Hepworth dans « La belle mère » est souvent délicat dans les familles. Diana et sa belle-fille Lucie vont, en effet connaître des différends. La mort de la première va laisser planer un doute quant à son suicide ou pas. 
" On ne choisit pas ses beaux-frères ou belles-sœurs, pas plus que la vieille tante aigrie et alcoolique de son conjoint, ou le cousin avec son défilé de petites copines qui ne parlent pas anglais. Mais avant tout, on ne choisit pas sa belle-mère. "
Ce roman est un thriller psychologique mais porte davantage sur les relations complexes entres Diana et sa belle-fille. Ainsi la psychologie prend très vite le pas sur l'action pure. Ce n'est pas un problème du tout puisque le lien entre les deux femmes est l'occasion à des rebondissements dans les affres d’une histoire familiale assez sombre. On cherche quand même à savoir qui est responsable de la mort de Diana mais il n'y a pas vraiment d'enquête détaillée comme dans un thriller classique. 

La plume de cette auteure australienne nous plonge dans une ambiance assez mélancolique. Trop peut-être dans certains passages ? Sally Hepworth dépeint très bien le deuil et les fractures dans la vie des deux héroïnes. Elle les fait astucieusement intervenir en leur donnant la parole alternativement. De cette façon, j'ai su entrer dans la vie intime de chacune. L'opposition entre Diana et Lucie insuffle un dynamisme et a vite attisé ma curiosité. 

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