mercredi 3 mars 2021

Gilles Vidal : " L'art de la fuite est un secret "

 


Editions La Déviation

120 pages


4 ème de couverture



Victor est peintre. Il abandonne sur son chevalet une toile abandonnée pour fuir un danger mortel. Lequel ? Il prend le premier train pour n’importe où – mais vers le sud tant qu’à faire – et désactive son portable.
Est-ce parce que le narrateur est peintre ? La lumière occupe une place importante dans le récit où les ambiances et les lieux insolites se succèdent. Chacun est très évocateur et renvoie le lecteur à ses propres souvenirs ou rêveries : ville de province inconnue, station-service hors d’âge, maison inoccupée, ville portuaire…
Un récit en un seul chapitre, à lire d’une traite mais sans précipitation. Gilles Vidal joue avec les codes du polar comme avec ceux du récit initiatique, manie habilement les symboles, impose son rythme dans un jeu complice avec son lecteur.
Au bout de la fuite : la mort… ou l’amour ?


Mon avis



Gilles Vidal avec « L'art de la fuite est un secret », emmène ses lecteurs dans un road-movie assez court qu'il jalonne de descriptions poétiques.

L'auteur emploie de longues phrases dans pratiquement tout le roman et utilise la première personne du singulier. Ceci donne une intimité sensuelle à l'histoire. Cependant, j'aurais davantage apprécié que cet effet de style ne soit pas systématique, l'action me semblant laisser la place à l'introspection. Mais j'ai finalement trouvé dans ma lecture la raison de ce choix d'écriture : l'anxiété ! On retarde les événements parfois par peur d'y être confronté.
« Je lui demandai, ce qu'il fit sans se faire prier et ce, avec de longues phrases de prosateur exalté qui n'en finissaient pas de se dérouler, parsemées d'incises précipitées qui témoignaient de son anxiété sous-jacente et, parfois, d'envolées embrouillées sur les bords»

Au fil des pages, la poésie du quotidien s'étale dans les moindres gestes du quotidien même les plus anodins. Dans « L'art de la fuite est un secret », mettre de l'essence, manger une pâtisserie relèvent de l'élégance la plus pure. 

Ainsi, les mots se succèdent pour montrer la vie des personnages et surtout la « fuite » d'un dénommé Victor et une femme qui l'accompagne. Une certaine angoisse et de la violence se détachent par petits fragments pour arriver à une fin énigmatique.

Les moyens de transport jouent un rôle comme s'ils évoluaient sur les phrases leur servant de routes interminables. J'avais parfois l'impression d'entendre les sons surgir de ce livre !
« Toujours rencogné contre la vitre froide fouettée par un fin crachin, les images aux gris multiples et étagés de banlieue sculptée au scalpel de misère, crachotaient maintenant devant mes yeux, en un rythme cisaillé à la manière d'un film en stop motion. »
Gilles Vidal est un maître quand il s'agit de laisser planer des ambiances. Ce roman (presque une nouvelle) est plein de poésie, un moment en dehors du temps dans lequel les sentiments sont passés au crible grâce à une écriture de haut vol !


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