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mercredi 21 novembre 2018

Jacques Saussey: " Enfermé.e"



French Pulp Editions
383 pages


4 ème de couverture



Se retrouver enfermée en prison pour de longues années, alors que l’on est déjà enfermée dans un corps qui n’est pas le sien… une double peine. Est-ce possible de reprendre une vie normale, une fois la dette à la société payée, alors que les autres ne vous jugent pas normale ? L’histoire de Virginie, l’histoire d’une vie, l’histoire d’une vengeance…



Mon avis



L'histoire que raconte Jacques Saussey dans " Enfermé.e" est très originale. Les personnages sont troublants et évoluent dans un monde de violence. La personne que l'auteur suit est lourdement marquée par son enfance et ses rencontres successives. Il est impossible d'en divulguer davantage sans dévoiler les ressorts de l'intrigue.

Il règne dans ce livre un mélange de souffrance, de culpabilité et de rédemption. Tout l'art de l'auteur est de savoir rendre l'ensemble cohérent et digeste. En effet, la dose de malheur y est presque létale. Les horreurs subies par certains protagonistes jaillissent de la plume d'un Jacques Saussey particulièrement en forme.

Celui-ci, justement change un peu de registre en abordant une histoire difficile. Et donc même en s'éloignant de sa zone de confort, j'ai trouvé qu'il avait très bien réussi le challenge. D'autant plus que le thriller y a aussi sa place. Les mystères sont nombreux et planent sur la noirceur générale.
L'auteur parvient à manipuler la chronologie et le lecteur. Effectivement, différentes périodes se côtoient sur plus de vingt ans. Il est vrai que j'ai eu un peu de mal à repérer les époques au tout début. Mais je n'ai pas regretté d'avoir patienté quelques paragraphes car j'ai vite été récompensée: l'ensemble est sublime. Jacques Saussey manie les différents rythmes d'écriture afin de distinguer les périodes et les personnages.

Les caractères sont forgés dans l'acier de la haine et de la violence. Ils sont soulignés par des phrases lapidaires. Des thèmes sont ainsi abordés autour de la nature humaine: la virilité, l'identité ou la misère sexuelle.

" La réussite, c'est comme un slip. ca ne se prête pas."


Bien sûr l'enfermement est au centre des multiples sentiments évoqués. Les barreaux sont omniprésents. Ils sont même là où on ne les attend pas. Ils sont aussi bien virtuels que tangibles. A cet égard, la magnifique couverture reprend parfaitement le sujet du roman.

" La mère a poussé la porte de la chambre de l'enfant, puis elle a allumé la veilleuse. Son fils était recroquevillé contre le bâti de son lit, ses petits poings verrouillés comme des cadenas aux barreaux."

La richesse de l'écriture permet de suivre une histoire explosive et dure. Des situations sont bien suggérées et échappent à la vulgarité grâce au style de l'auteur. J'ai été, au fil des pages scotchée par les réactions des personnages. J'ai lu le mépris dans les répliques et j'ai été aussi dégoûtée par certains tortionnaires, par les gens sombres et dangereux qui ont "ce besoin de torturer ceux qui ne vous ressemblent pas, ceux dont les moyens de défense sont réduits à l'espoir que les choses changent un jour. "

Si quelques passages sont moins intenses que d'autres, c'est que l'insupportable doit être atténué. En tant qu'écrivain chevronné, Jacques Saussey sait quand il doit épargner le lecteur au risque de trop le secouer. Il n'empêche que souvent, je lisais les lignes, le regard troublé par l'émotion.

Je ne saurais que conseiller d'entrer dans cette histoire afin de mieux saisir le véritable enfermement ou au moins avoir de l'empathie pour ces personnes qui tentent de s'évader de situations pratiquement inextricables. "Enfermé.e " est pour moi une invitation à la tolérance, à voir au-delà des apparences.




Bande annonce




L'auteur



« Parmi les meilleurs auteurs de polars actuels », Franck Thilliez

Depuis la parution de son premier livre (De sinistre mémoire, 2010) Jacques Saussey (1961) a publié une dizaine de romans, tous salués par la critique et acclamés par le public. Intrigues fouillées et personnages ciselés sont la marque de fabrique de cet orfèvre du genre, qui s’impose comme la relève du polar à la française.



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