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samedi 14 octobre 2023

Clarence Pitz : " Les enfants du serpent "

 


Editions Phenix Noir

478 pages


4 ème de couverture


Tout le monde est capable d'aimer. Même les pires ordures.
2012. La brutalité des hommes s’abat sur le village de Bumia, à l’est de la République démocratique du Congo. Un groupe armé surnommé « les arracheurs » commet les pires atrocités. Parmi les victimes, Gloria et sa fille Phionah. L’âme blessée, le corps ravagé, elles parviennent à prendre la fuite, laissant derrière elles un champ de cendres et plusieurs dizaines de morts.
2017. Au cœur de Bruxelles, dans le quartier populaire de Matonge, un homme défiguré et énucléé est retrouvé dans un caniveau. L’inspecteur Karel Jacobs reconnaît la signature des « arracheurs ». A l’approche du procès d’un de ces miliciens, Jacobs craint que les témoins du massacre de Bumia ne soient à nouveau en danger. Engagé dans une course contre la montre, il va devoir se plonger dans ses souvenirs pour sauver la vie des deux rescapées. Mais aussi de ses proches.
Pour son quatrième roman, Clarence PITZ - la lauréate du Prix de l’auteur belge 2022 - Catégorie Thrillers - signe un récit poignant, à la fois dur et profondément humain.


Mon avis



J'ai rencontré plusieurs fois Clarence Pitz dans des salons et je n'avais jamais lu ses romans. C'est lors du salon du polar de Templemars fin septembre que j'ai pu lire un de ses écrits " Les enfants du serpent " sorti récemment.

Dès les premiers chapitres, Clarence Pitz décrit une ambiance noire et tortueuse. Des miliciens sèment la panique dans le village de Bumia. Ils s'en prennent à des femmes et à des filles afin de leur faire subir les pires atrocités. Les hommes du village sont obligés de regarder une telle monstruosité. Sinon ils perdent la vie. Gloria et sa fille, Phionah, ont réussi à fuir la violence de ces soldats.
" Ces ordures se servent de leur corps pour les anéantir, les rendre honteuses, impures, impossibles à marier, incapables d'enfanter. "
En 2017, à Bruxelles une scène de crime est confiée à l'inspecteur Karol Jacobs  de la Police fédérale de Bruxelles. Un homme est retrouvé sans ses yeux à Matonge. Serait-ce l'œuvre " des arracheurs " ? 

" Les enfants du serpent " explore des thèmes toujours d'actualité tels que la violence faites aux femmes et aux enfants en Afrique. Je ne suis pas sortie indemne de cette lecture car ce thème est assez dure et me touche profondément. Clarence Pitz a une écriture vive, remarquable et assez intense. Beaucoup d'actions et de rebondissements se ressentent au fil des pages, si bien qu'il est impossible de lâcher ma lecture.

" Les enfants du serpent " est aussi un thriller empreint d'humanité et d'une noirceur absolue. Seriez-vous prêts à faire face à un tel massacre décrit par l'autrice ?

C'est un roman vraiment réussi avec des personnages attachants et bien dessinés. Je suis sortie de ma lecture totalement perturbée car je suis passée par tous les stades émotionnels.
" Maintenant, on viole par superstition. Violer une vierge porterait chance et permettrait de trouver beaucoup de coltan dans son tamis. Les violences faites aux femmes sont banalisées, les crimes rarement punis. Les victimes restent silencieuses. L'homme veut, il se sert. Point. "
Je lirai sans aucun doute ses précédents écrits car " Les enfants du serpent " est une véritable merveille livresque. 
A découvrir de toute urgence ! Entre Congo et Bruxelles, vous plongerez dans les abîmes de l'âme humaine. 

Je partage également le ressenti de Yannick et je la remercie au passage pour le prêt de ce roman. On avait promis à l'autrice de faire un double retour sur son dernier roman. On a tenu notre promesse !


L'avis de Yannick Dubart



Il y a des romans qui sont agréables à lire mais qu'on oublie vite, c'est bien mais sans plus. Et puis, on tombe sur une pépite. Et, là encore, il y a le diamant brut et on est un lecteur heureux. Ensuite, on est scotché devant un diamant, poli, travaillé, taillé… Et on est en extase devant le joyau ! Et si pour couronner le tout l'auteur de ce bijou d'exception est sympathique, on est ancré dans l'addiction, il n'y a plus qu'à creuser pour en trouver d'autres en espérant que ledit auteur en a déjà écrit d'autres.

Voilà pour dire que « Les enfants du serpent » est une bombe du polar qui correspond bien à cette description. L'artiste en question est Clarence Pitz. D'un sujet existant, elle a concocté une histoire poignante en évitant les pièges du pathos.
L'intrigue est bourrée d'action et d'adrénaline. La réalité se mêle à la fiction sans lasser une seconde. Donc, on est bien face à une pépite avec « Les enfants du serpent ». Déjà dès le début, l'auteure nous plonge dans un monde d'horreur et de souffrance.
« Bon dieu ce qu'elle a mal, mais la douleur n'est pas une option. »
Les mots « sautent aux yeux » afin de décrire le combat entre l'innocence et la monstruosité humaine. En République Démocratique du Congo, ce sont les femmes et les enfants d’abord. Ils sont, en effet, les premiers à souffrir d'une société engluée dans la pauvreté. Des miliciens pratiquent la politique du viol pour anéantir des familles et s'enrichir.
« Les hommes armés sont partis, emportant avec eux ce que les femmes du village ont de plus cher. L'innocence de leurs enfants, leur dignité, leur soif de vivre. »
Et à côté de ces exactions, en Belgique, l'inspecteur Karel Jacobs se retrouve impliqué moralement et professionnellement par des massacres perpétrés en Afrique. Dans sa tête, le passé tourne et envenime son quotidien depuis que son équipe a découvert un homme énucléé. De quoi lui rappeler de très mauvais souvenirs. Pourtant il a une fille qui va bientôt accoucher, ce qui devrait augurer de joyeux moments. Oui, mais, certains vont faire de ces événements un enchaînement d'abominations.

Justement, la force des mères est constamment mise en valeur tout au long du roman. Les mamans veillent mais ne peuvent pas toujours réussir à épargner leurs enfants. À l'image de la nature africaine… bien décrite dans sa beauté et ses pièges.
Clarence Pitz enrobe son polar d'une écriture de grande qualité. Sans aucun doute, cette auteure sait très bien écrire. Elle parvient à instaurer des ambiances poisseuses et misérables mais aussi à montrer la beauté des éléments naturels comme la mangrove. Chaque action est servie par des phrases parfaites.
« Gloria sursaute à chaque hululement, piaillement, craquement. Parfois, elle entend au loin des hurlements, des plaintes lancinantes comme si on arrachait ses tripes à un animal. Ou bien ce sont des grognements féroces qui la poussent à accélérer le pas, le sang glacé d'effroi. »
Ainsi l'auteure mène aussi bien ses scènes d'actions que les moments intimistes. Le vocabulaire est adapté à chaque situation, ce qui contribue à rendre le récit très crédible. Parfois je me suis dit « Mais comment fait-elle pour être aussi juste, pour rendre son récit autant crédible ? ». Bah, il faut se dire que Clarence Pitz a vraiment du talent. Pour ma part, elle fait partie des grandes du polar.
Bon vent la louve !

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